• COMMUNIQUE

    Suite aux nombreuses expulsions de ces deux derniers mois, ciblant des Rroms de Roumanie et de Bulgarie, "La voix des Rroms" appelle à une manifestation aura lieu le mercredi 31 octobre 2007 à Saint-Denis.

    Elle sera précédée par une

    Conférence de presse

    Mercredi 31 octobre à 13 heures 30

    Sur le terrain dit « du Hanul », où habitent quelques dizaines de familles rroms

    Accès à proximité de la jonction de la rue Jules Saulnier et de l'avenue Anatole France

    Ensuite, vers 14 heures, nous marcherons vers la mairie et la sous-préfecture de Saint-Denis. Si vous pensez ne pas être concernés, rappelez-vous une chose: chaque expulsion coûte environ 10.000 Euros, et ce sont vos impôts qui y passent, tandis qu'on nous casse les oreilles avec le déficit budgétaire qu'il faut éliminer. Puis, dites-vous bien que dans le cas des Rroms roumains et bulgares, au-delà de la destruction systématique de tout projet de vie pour ces familles, les renvois ne sont que de la poudre aux yeux, pour gonfler artificiellement les chiffres. En fait, en tant que ressortissants de pays de l'Union européenne, ils ont parfaitement le droit de revenir et ils reviennent. Mercredi, ils seront là pour en témoigner. Ci-dessous un communiqué plus détaillé de ce qui est un vrai gâchis pour tout le monde

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    Les retours humanitaires forcés :
    un nouveau concept !

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    Le ministre de l'Immigration a bien du mal à atteindre l'objectif de 25.000 reconduites à la frontière qui lui a été fixé pour 2007... Il s'en était justifié en août dernier en mettant en avant « la difficulté d'expulser Roumains et Bulgares », dont les pays sont désormais membres de l'UE, ce qui rend les procédures « plus complexes ». Il vient de trouver une solution : des dispositifs d'aide au « retour humanitaire », instaurés par une circulaire de décembre 2006, ont été utilisés à plusieurs reprises pour habiller des opérations d'expulsion de ces nouveaux citoyens européens.

    A Bondy (93) le 26 septembre dernier, à Saint-Denis le 10 octobre, Bagnolet le 24, et dans d'autres villes encore, la police a investi à l'aube des terrains occupés par des Rroms, ressortissants bulgares ou roumains selon les cas, a fait monter les habitants dans des bus affrétés tout exprès, et leur a donné à choisir entre « la prison » ou « l'expulsion immédiate avec l'aide au retour ». Personne n'a été autorisé à récupérer ses affaires, ni à présenter les documents qui auraient pu prouver qu'il remplissait toutes les conditions pour avoir le droit de rester durablement en France. Ceux qui avaient sur eux leurs passeports se les sont vu confisquer. Les bus ont emmené tout le monde directement en Bulgarie ou en Roumanie, quasiment sans faire de halte.

    À l'arrivée, des chèques correspondant à la fameuse « aide au retour » ont été remis à chacun des passagers de ces bus, d'un montant de 153 euros pour les adultes et de 46 euros pour les enfants.

    Les expulsions de terrains occupés parfois depuis des années par des Rroms, de quelque nationalité qu'ils soient, ne sont pas exceptionnelles. Dès le début de l'été, ces expulsions ont été accompagnées de distribution en rafales d'OQTF (Obligation à quitter le territoire français), motivées de façon plus que fantaisiste. Les opérations de ces dernières semaines sont, elles, d'un genre tout nouveau, où se conjuguent brutalité et mépris total du droit.

    Les victimes de ces retours forcés sont en effet des citoyens européens, et depuis janvier 2007, Bulgares et Roumains, à l'instar des ressortissants des dix Etats devenus membres de l'UE en mai 2004, jouissent du droit à la libre circulation en Europe.

    En cas de contestation de ce droit en France, il doit leur être remis une OQTF dûment motivée. Seulement voilà : une mesure administrative est susceptible de recours, et la procédure qui s'ensuivrait empêcherait d'exécuter l'expulsion du territoire ou rendrait difficile de l'exécuter rapidement. Or il faut faire du chiffre ! Et peu importe que les personnes chassées reviennent quelques semaines après...

    Par bonheur, une circulaire de fin 2006[1] organise des retours dits « humanitaires », gérés par l'ANAEM, pour les étrangers en situation irrégulière ou de dénuement. Quelle aubaine ! Partout en France on s'est empressé d'utiliser ce dispositif.

    Certes, la circulaire détaille toute une procédure à mettre en œuvre : information, préparation d'un projet de réinstallation, accompagnement personnalisé avant le départ et le cas échéant à l'arrivée dans le pays de retour. Dans les opérations des dernières semaines, rien de tout cela n'a été respecté : ni vérification du droit au séjour des intéressés, ni notification d'une OQTF, ni information, ni enquête sociale... Rien, sinon les 153 euros, gages apparemment qu'il s'agit bien de la procédure ANAEM de retour « humanitaire ».

    Nicolas Sarkozy, lors de sa récente visite en Bulgarie, a déclaré, évoquant le sauvetage des infirmières bulgares, que tout « opprimé (...) devient automatiquement français » !! Le paradoxe entre les larmes versées sur les infirmières bulgares (en Bulgarie) et le traitement réservé aux Bulgares (en France) est aussi éclatant que celui qui associe l'idée d'aide au retour « humanitaire » avec le sordide de ces rafles menées au petit jour, dans la précipitation, sous les menaces et le chantage, avec destruction de tous les biens des personnes raflées... Nouvelle figure de l'humanitaire, ces citoyens européens enfermés à bord de bus roulant à tombeau ouvert ?...

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    Des Rroms de Roumanie et de Bulgarie ont participé hier, samedi 20 octobre, à la manifestation contre la nouvelle loi sur l'immigration, dite loi Hortefeux. Bien que depuis le 1er janvier 2007 leurs pays respectifs font partie de l'Union européenne, le dispositif réglementaire en place leur rend impossible de travailler en France, et de ce point de vue ils relèvent d'un statut très similaire à celui d'autres étrangers non communautaires. Aussi, les rafles se multiplient sur eux, pour atteindre les objectifs chiffrés des expulsions. Alors, ils sont descendus dans la rue, avec les autres. Ils y ont emmené aussi leurs instruments. C'était une manif, mais aussi un concert un peu particulier de la fanfare Magura, un concert qui a commencé à Belleville et qui s'est terminé devant le Conseil d'Etat, près du musée du Louvre.


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  • LETTRE OUVERTE

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    A M. Marc EVERBECQ

    Maire de Bagnolet

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    Bagnolet, le 26 septembre 2007

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    Monsieur le Maire,

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    Bientôt il se sera écoulé trois ans depuis que vous-même, ainsi que d'autres élus de notre ville, avez pris l'engagement de nous soutenir après l'incendie qui a ravagé nos habitations de fortune. Au cours de cette période, le dialogue que nous avons mis en place avec vous et les services de la ville a abouti dans un premier temps à notre hébergement d'urgence dans un centre de loisirs désaffecté et à la mise en place d'un projet de relogement et d'insertion sociale pour un certain nombre d'entre nous, les familles restantes devant bénéficier d'un autre projet similaire dans un avenir proche, conformément à l'engagement que vous avez pris en juillet dernier et qui nous a été encore confirmé il y a trois semaines par votre directeur général.

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    Nous sommes parfaitement conscients que l'implication de l'Etat dans cette initiative, initiative saluée par toute une série d'acteurs, dont le Commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, est nécessaire pour sa réussite. C'est pourquoi nous considérons indispensables les pourparlers qui ont cours en ce moment avec la préfecture de la Seine-Saint-Denis. Cependant, nous tenons à rappeler la spécificité de notre cas à Bagnolet, qui tient dans une action concertée des élus, des services municipaux, et de nous-mêmes ; nous sommes donc quelque peu inquiets de la manière dont la MOUS (Maîtrise d'œuvre Urbaine et Sociale) s'annonce. En effet, contrairement à ce qui s'est passé à Aubervilliers, et plus récemment à Saint-Denis, cette nouvelle MOUS n'intervient pas « dans un vide », mais peut et doit s'appuyer sur les réalisations actuelles : des logements pour la plupart d'entre nous, l'hébergement en hôtel pour les personnes restantes et un début d'accompagnement social pour l'ensemble.

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    Dans ce contexte, nous souhaitons faire savoir que l'utilité de l'enquête sociale qui se profile comme un préalable à la mise en œuvre de la MOUS nous semble plus que douteuse. En effet, vous savez que, missionnée par la ville, France-Terre d'asile avait conclu que notre prise en charge et notre accompagnement social n'était pas envisageable. L'expérience subséquente a pourtant démontré le contraire, et nous avons su agir en partenaires actifs et constructifs aussi bien avec les élus qu'avec les services administratifs de la ville. Au contraire, les enquêtes sociales commandées par la préfecture de notre département à ce jour mettent à l'écart toute consultation avec les concernés. De plus, les critères de sélection ont toujours été flous, changeants et opaques et le choix opéré n'est souvent pas pertinent. C'est ce qui explique entre autres qu'à Aubervilliers, parmi les 80 personnes sélectionnées, seulement une cinquantaine bénéficient aujourd'hui du projet. Une enquête sociale tendant à faire une sélection de bénéficiaires à Bagnolet est surtout inutile du fait que nous sommes déjà relogés pour la majorité d'entre nous et que les coûts qu'elle suppose pourraient couvrir, au moins en partie, le relogement des quelques personnes restantes.

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    Par ailleurs, il est totalement absurde que la Préfecture pose comme condition préalable à notre accompagnement social d'avoir un travail alors que notre situation administrative nous empêche aujourd'hui de travailler légalement. De même il est illogique de poser la scolarisation de nos enfants comme critère avant d'avoir associé l'Inspection Académique de la Seine-Saint-Denis à notre accompagnement social afin d'obtenir une réponse favorable pour la scolarisation de nos enfants. Bien sûr nous souhaitons tous travailler, scolariser nos enfants et maîtriser le français mais notre accompagnement devrait nous offrir les moyens pour atteindre ces objectifs et non pas se servir de leur réalisation incomplète comme un motif d'exclusion.

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    L'implication de la préfecture nous paraît indispensable dans la mesure où le droit de travail, clé de notre intégration, en dépend. Aussi, nous vous prions de faire le nécessaire afin d'obtenir l'engagement de la préfecture à nous délivrer des autorisations de travail sans passer par la procédure actuelle qui rend l'obtention de celles-ci impossible en pratique (cf. dans ce sens l'article du journal L'Humanité du 14 septembre 2007 « L'expulsion des Rroms n'a pas cessé » http://www.humanite.fr/2007-09-14_Tribune-libre_L-expulsion-des-Rroms-n-a-pas-cesse ).

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    Aussi, nous vous demandons par la présente de faire part de nos observations à la préfecture, et en y prenant appui de :

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    1. Refuser toute enquête sociale dont l'objectif serait d'opérer un choix entre les personnes que vous vous êtes engagées à soutenir, un engagement que vous avez honoré jusqu'à présent

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    1. Poursuivre le projet de relogement et d'insertion socioprofessionnelle en l'étendant aussi à ceux d'entre nous qui n'ont pas été retenus dans le foyer d'hébergement avenue Gallieni, mis en place avec le soutien de la région d'Ile-de-France.

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    1. Intégrer l'Inspection d'académie de la Seine-Saint-Denis en tant que partenaire à cette MOUS, en ce qui concerne la scolarisation des enfants

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    1. Exiger de la préfecture que la Direction départementale du travail et de l'emploi nous délivre des autorisations de travail dans les plus brefs délais et sans exiger une promesse d'embauche au préalable, étant donné que nous faisons déjà l'objet d'un accompagnement social

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    Forts de l'expérience des trois dernières années à Bagnolet, mais aussi des erreurs qui ont pu être commises ailleurs dans des cas similaires et dont nous pensons qu'il faut tirer des leçons, nous avons confiance en votre soutien. Il en va de notre avenir, mais aussi de la réussite d'un projet exemplaire qui a été mené presque à son terme et qu'il serait dommage de compromettre par une précipitation mal venue.

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    Veuillez agréer, monsieur le maire, l'expression de nos salutations distinguées

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    Les Rroms bulgares de Bagnolet

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    Association « La voix des Rroms »                            Le comité de soutien aux Rroms de Bagnolet


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  • Cinq associations rroms, parmi lesquelles "La voix des Rroms", ont participé aujou'd'hui au Forum avec l'experte indépendante des Nations Unies, sur les questions relatives aux minorités en France. Un échange fort intéressant, dont nous espérons qu'il produira quelque effet. Certes, il n'est pas du ressort de l'ONU de régler les problèmes que les minorités rencontrent en France, mais l'appui du rapport qui sera rendu par Mme. MacDougall sera évidemment un atout. Voici une note que nous avons présentée et remise, conjointement avec l'Union rromani internationale, le Centre AVER contre le racisme, le Centre culturel gitan et l'association "Ternikano Berno" (Cercle de la jeunesse):

     

    Note préliminaire à l'élaboration d'une stratégie de réduction des discriminations à l'égard des Rroms, Sintés et Kalés de France

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    présentée au

    Forum sur les questions relatives aux minorités en France

    Un échange avec l'Experte Indépendante des Nations Unies
    sur les questions relatives aux minorités,
    Madame Gay McDougall

    Jeudi 20 septembre 2007

    au siège de l'UNESCO, Paris



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    Il a été constaté à plusieurs reprises qu'existe un état alarmant de l'exercice des droits et des conditions de vie de certains citoyens français ou ressortissants étrangers en France, tout particulièrement lorsqu'il s'agit de Rroms.

    Un exemple parmi tant d'autres de ce constat est le rapport récent de l'ERRC sur les Rroms en France, intitulé « Hors d'ici ! ». Au-delà de ce rapport d'une organisation non-gouvernementale, l'étude menée par le bureau de l'Ambassadeur aux droits de l'Homme en 2006 pointe lui aussi le traitement discriminatoire des « gens du voyage », y compris par des dispositions législatives et réglementaires en vigueur.

    Ces constats sont d'autant plus inquiétants que, la République française fondant sa législation sur le principe de l'égalité de tous devant la loi et interprétant de manière spécieuse la Constitution, les autorités françaises ne reconnaissent pas la notion de « minorité » sur son sol. Or, des discriminations existent bel et bien, tant positives que négatives et il convient dès lors de s'interroger sur la manière à la fois légale et légitime qui sera nécessaire pour établir les causes profondes des discriminations évidentes dont sont victimes les Rroms, non seulement en ce qui concerne les textes en vigueur, mais aussi la pratique quotidienne.

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    Schématiquement, on peut dire qu'il ne peut pas y avoir de racisme dans un pays tant que la loi ne reconnaît pas l'existence de divers groupes ethniques, parce qu'il ne peut y avoir de discrimination de quelque chose qui juridiquement n'existe pas. Ainsi, en République tchèque, il y a quelques années, la justice avait refusé de reconnaître la motivation raciste d'un meurtre dont fut victime un jeune Rrom, en prenant appui précisément sur l'absence de reconnaissance de la race par la loi tchèque. Les idées les plus nobles peuvent donc engendrer les pires perversions, surtout si les années passent et laissent le temps à une réaction sordide de les retourner contre leur but initial; avec l'installation de cette réaction, la perversion bénéficie d'appuis quasi professionnels ; elle devient systématique et très difficile à combattre.

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    Deux axes sont à distinguer pour arriver à une perception réaliste de la question :

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    A) Il est essentiel dans un premier temps d'établir une reconnaissance effective du peuple rrom comme population sans territoire compact, de dimension européenne, avec une histoire, une langue, une culture variée mais commune, composée de citoyens, pour la plupart français mais aussi parfois d'autres pays, tous attachés à ce pays qu'ils ont en commun avec d'autres populations : la France. La nouvelle conception de reconnaissance de langues et cultures diverses en France (diversité culturelle), constituant toutes ensemble un patrimoine national commun et donc éléments de d'échange et de rassemblement (au contraire d'éléments non-interpénétrables, propriétés spécifiques de "communautés") nous semble très judicieuse pour affirmer des droits consacrés par de nombreux instruments internationaux que la France devra bien finir par accepter comme une richesse, tout en combattant à juste titre les phénomènes de communautarisme. C'est de plus une approche qui mérite d'être diffusée au niveau européen pour combattre les replis communautaristes trop souvent encouragés et assurer une vraie stabilité à notre continent, tout en assurant à chacun l'épanouissement auquel il a droit dans sa/ses langue(s) et sa/ses culture(s).

    Par ailleurs l'identité est une dynamique positive émanant du groupe humain considéré et qui s'appuie sur des traits constructifs en termes de contribution au sein de la société générale, et non sur un " racisme commun", trait négatif, subi, extérieur, destructeur , jamais valorisant. De plus, les Rroms et les Gaʒés du voyage sont loin d'être les seules victimes de racisme, il y a des centaines de groupes humains, qui ne sont pas forcément riches d'une identité féconde (drogués, machistes, caïds, mafieux etc...). On ne peut mettre tous les groupes humains sur le même plan ni faire de toute identité une valeur en soi : il faut savoir de quel type d'identité on parle : repliée sur elle-même, néfaste, destructrice, véhiculant des contre-valeurs ou au contraire ouverte, positive, constructive et enrichissante.

     

     

    B) L'autre élément indispensable est la nécessité de distinguer le plan du mode de vie (sédentaire ou mobile, ce dernier partagé aussi bien par les forains et les bateliers que par les Sintés et Rroms Lovara ou Ćurara etc...) du plan de l'identité culturelle et linguistique qui est celui des Rroms, Sintés et Kalés. A cette distinction il est souvent répondu que les « GdV » ont une identité spécifique ; or cet argument n'est en rien pertinent, d'abord parce qu'il n'a rien à voir avec l'identité des Rroms, Sintés et Kalés, mais surtout parce que tout groupe humain développe une identité à lui, y compris les scouts, les polytechniciens, les taulards, les fans de Jennifer Lopez, les marins pêcheurs, les orthodoxes, les végétariens, les drogués, les machistes, les caïds, les mafieux etc...). En outre, toute identité est influencée par l'idéologie dominante et doit être considérée avec circonspection. C'est l'idéologie dominante qui a déplacé chez certains Rroms, Sintés ou Kalés l'identité ancestrale vers celle de « GdV » - au moins dans leurs déclarations aux officiels.

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    Et surtout, il faut éviter de centrer une identité sur la victimisation. Il est essentiel de souligner que le fait de centrer une identité sur la victimisation a deux conséquences très graves :

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    - on oblitère la véritable identité féconde d'un peuple réduit à la qualité d'objet de compassion – péché mignon des ONG qui traitent les membres de groupes qui ne répondent pas aux critères de la société dominante comme des enfants ou des handicapés mentaux, essayant de faire leur bien sans eux, en les muselant, les minorisant, leur accordant quelque obole avec une condescendance souvent inconsciente, tout en niant leur langue, leurs aptitudes, leurs coutumes, leur sensibilité en une sorte de culturocide paternaliste, ce qui est une forme de négationnisme ou d'amputation d'un patrimoine essentiel de l'humanité, et donc une attitude raciste dans son essence;

    - on met l'emphase sur la revendication catégorielle, le conflit social et la désintégration, donc l'agressivité défensive est rapidement récupérée comme offensive par la société dominante, et on renforce le racisme – en faisant de l'anti-racisme une marchandise avec ses lois du marché et des subventions.

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    Dans cette perspective, nous sommes inquiets de la tendance actuelle à reconnaître progressivement les « minorités visibles », car cette conception découle mécaniquement de la victimisation aveugle : une minorité n'est visible que parce que les autres la voient, et non pas parce qu'elle se sent vivre en tant qu'une entité en évolution, en contact et en échange avec d'autres identités qui l'entourent. Or, la « minorité visible » ne peut qu'être objet de politiques d'égalisation avec les autres, comme est pratiquée dans un certain nombre de pays la discrimination positive ou l'action affirmative. Ce type de politiques n'a pas fait ses preuves, et nous observons dans des pays d'Europe centrale ou dans les Balkans une dégradation sévère de la situation générale, parallèlement à la création d'une classe de caciques que la discrimination positive a mis au devant de la scène. Ces caciques n'ont que faire du bien de leur communauté et agissent seulement en qualité de vedettes, souvent marionnettes d'un pouvoir étranger à la communauté. Ils font souvent dans la communauté autant de mal que les racistes à l'extérieur – un lien existe d'ailleurs souvent entre les deux. L'idée qui sous-tend ces politiques est celle de l'égalisation au fur et à mesure que les différences s'effacent par l'ignorance persistante à leur égard. Sur le plan de l'efficacité, il suffit de rappeler qu'aucune politique, y compris violente, - n'a réussi à effacer totalement l'identité rromani. Sur le plan de l'éthique, il est inacceptable qu'au 21e siècle, alors que le discours sur la diversité élève celle-ci, à juste titre, au sommet des facteurs de cohésion, les comportements l'ignorent, ou au meilleur des cas la déforment et la relèguent à la sphère privée, poussent au repli communautaire et à des formes d'intégrisme.

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    Par conséquent, les associations signataires recommandent :

    1. La reconnaissance des Rroms, Sintés et Kalés comme une minorité sans territoire compact, présente en France depuis le 15e siècle, caractérisée par une origine indienne commune et une langue spécifique, également d'origine indienne, le rromani, référence commune aux Rroms, Sintés et Kalés partout en Europe et au-delà ;
    2. Le soutien à l'affirmation de cette identité rromani par des politiques publiques en tant que partie intégrante de l'identité nationale française et de l'identité européenne – y compris la promotion de l'usage du rromani dans l'enseignement et un effort soutenu pour faire connaître les Rroms, Sintés et Kalés à tous leurs concitoyens ;
    3. L'exploitation de manière optimale des possibilités existantes pour une affirmation saine et sereine de l'identité rromani, telles que l'existence d'une section d'études de langue et de civilisation rromanies à l'Institut des Langues et Civilisations Orientales à Paris, par :

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    a) L'utilisation optimale de l'expertise qui a pu se constituer dans cette section depuis 1997 dans le domaine de la recherche sur les Rroms afin de diffuser auprès du grand public des informations permettant de combattre toutes les formes d'antitsiganisme ;

    b) L'institution d'un programme de bourses pour les candidats à ces études, tant ressortissants français qu'étrangers, le cas échéant dans le cadre d'initiatives et de programmes internationaux tels que les programmes de l'Union européenne et le Fond pour l'Education des Rroms

    c) L'information qui est scandaleusement absente sur la question fondamentale « Qui sont les Rroms ? » allant de l'insertion dans les manuels scolaires d'explications sur notre peuple à la divulgation de l'internement et du génocide qu'il a subi lors de la seconde guerre mondiale, le silence sur ce point étant la preuve d'un négationnisme caractérisé : la masse des citoyens membres de la société dominante ne connaissant des Rroms que leur musique, qu'ils apprécient, mais ignorant totalement leur littérature, leur histoire, leurs coutumes.

     

    1. L'ouverture de l'espace public à l'utilisation de la langue rromani, notamment en ce qui concerne les médias et l'enseignement
    2. L'abrogation des dispositions législatives et réglementaires discriminatoires à l'égard des «gens du voyage », et l'inscription immédiate de ceux-ci dans le droit commun
    3. Le traitement distinct, tant du point de vue des structures compétentes que des règles applicables, de la question du mode de vie mobile d'un certain nombre de citoyens d'une part et de l'identité culturelle des Rroms, Sintés et Kalés et d'autre part, ces derniers étant définis conformément au point 1.
    4. Alors que la mobilité est de plus en plus promue par les politiques publiques notamment dans le domaine professionnel, sa criminalisation lorsque ce sont des Rroms qui la pratiquent doit être supprimée de la législation. Le droit de circuler, impliquant aussi celui de stationner, de s'arrêter et de reprendre le voyage, tel que reconnu à l'article 13 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme doit bénéficier de mécanismes législatifs nationaux lui permettant son exercice plein et entier.

    L'étude de l'histoire révèle que les Rroms, Sintés et Kalés ont toujours prospéré de manière satisfaisante en harmonie avec les règles des pays où ils vivaient, sauf là où ils étaient victimes d'antitsiganisme ou bien étaient réduits à l'assistanat par des politiques prétendues humanitaires, en réalités marginalisantes. Il est donc indispensable de combattre en profondeur toutes les racines de l'antitsiganisme – objectif qui peut être atteint en 20 ans si les politiques s'en donnent les moyens et de revoir également en profondeur les diverses formes de soutien aux Rroms, Sintés et Kalés pour transformer l'assistanat en dynamisation de l'éducation.

    Ceci ne peut se réaliser que si les deux axes évoqués plus haut sont pris en considération de manière effective et que si les actions entreprises en France sont articulées avec celles développées dans les autres pays de l'Union européenne et en même temps harmonisées avec la promotion des autres minorités en France, toujours dans une perspective de communication, de respect mutuel et d'échange citoyens.

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    Dr. Marcel COURTHIADE <st1:PersonName>Saimir MILE</st1:PersonName>

    Union rromani internationale La voix des Rroms

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    Jeanne GAMONET

    Centre AVER de recherche et d'action sur toutes les formes de racisme

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    Brahim MUSIĆ Jean SARGUERA

    Ternikano Berno – Youth Circle Centre culturel gitan

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  • Aujourd'hui, 31 août 2007, vers 10 heures, une vingtaine de Rroms qui avaient été expulsés d'un terrain situé derrière la rue André Campra à Saint-Denis se sont rassemblés devant la mairie de Saint-Denis. Ils font partie de ceux des 600 Rroms qui se trouvaient sur ce terrain et qui n'ont ni été sélectionnés pour le projet d'insertion professionnelle mis en place par la sous-préfecture, ni accepté la fameuse « aide humanitaire au retour » gérée par l'ANAEM. Ils étaient venus demander à la mairie une solution pour leur relogement.

    Un représentant de « La voix des Rroms » est allé à leur rencontre et après une consultation, une demande d'entretien avec M. le maire a été rédigée, précisant les aspirations de ces familles : apprentissage du français, insertion professionnelle, inscription des enfants à l'école et relogement provisoire en attendant l'acquisition d'une indépendance de chacun.

    Une délégation de 6 personnes a été reçue par la première adjointe au maire, Mme Soulas, ainsi que MM. Cossic et Dionisi, des services administratifs de la municipalité. Mme. Soulas a précisé que la municipalité de Saint-Denis saluait l'initiative de la sous-préfecture, mais qu'elle avait bien mis en garde sur le fait que l'évacuation du terrain créait une situation nouvelle difficile pour les concernés (les expulsés) qui ne pourrait pas être gérée par la ville. Cependant, la municipalité relancera sa demande d'une table ronde au niveau au moins régional pour trouver des solutions à cette situation qui se retrouve dans beaucoup d'autres villes d'Ile-de-France. « La voix des Rroms » a fait part de son analyse de la situation, notamment du fait, peu connu et/ou négligé par les autorités, que dans la plupart des cas, les familles concernées viennent d'un milieu rural. Ainsi, il serait plus judicieux et plus conforme aux demandes des concernés à élargir le champ du travail et explorer les possibilités d'installation des familles qui le souhaitent dans des villages français, où elles peuvent à la fois acquérir des expériences nouvelles et contribuer au développement durable par l'agriculture biologique.

    Concernant la demande de relogement, la mairie de Saint-Denis s'est dite dans l'impossibilité d'y répondre. Consciente du risque de voir un nouveau bidonville se constituer où des bâtiments en abandon occupés, Mme. Soulas a informé que la durée d'une telle installation ne dépendait pas de la volonté de la mairie mais que celle-ci ne demanderait pas d'expulsion.

    Sur la question de la scolarisation des enfants, les Rroms y tiennent d'autant plus que la rentrée arrive à grands pas, et des démarches seront faites au cours de la semaine prochaine.

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