L'EXPERTE INDEPENDANTE DES
NATIONS UNIES SUR LES QUESTIONS RELATIVES AUX MINORITES LANCE UN APPEL
EN FAVEUR D'UN FERME ENGAGEMENT AU PLUS HAUT NIVEAU POUR PROMOUVOIR LA
NON DISCRIMINATION, L'EGALITE ET LA DIVERSITE EN FRANCE
Paris, 28 septembre 2007:
Au cours de sa visite officielle en France, Mme Gay J. McDougall, l'experte
indépendante des Nations Unies sur les questions relatives aux minorités
a constaté que les membres de communautés minoritaires en France font l'objet
d'une grave discrimination et a appelé au Gouvernement français à réagir
par des politiques de lutte contre une discrimination répandue, enracinée
et institutionnalisée dans la société française. « Le racisme est vivant,
pernicieux et il cible clairement les minorités « visibles » issues de
l'immigration qui sont pour la plupart des citoyens français », a t'elle
affirmé.
« Les espoirs et les rêves des
jeunes sont ignorés ; ils ne voient aucune possibilité de promotion sociale
en raison de la couleur de leur peau, de leur religion, de leur nom de
famille ou de leur adresse (dans ce que l'on appelle les banlieues sensibles).
Des personnes qui ont beaucoup travaillé, qui ont respecté toutes les règles
du jeu et qui croient sincèrement aux principes de la République Française
se retrouvent piégées dans des ghettos urbains géographiquement et socialement
isolés où le taux de chômage dans certains cas peut dépasser les 40%. Ils
se sentent discriminés et rejetés par une conception rigide de l'identité
nationale française qui ne leur correspond pas », a expliqué d'experte
indépendante.
L'experte indépendante s'est
dite préoccuppée par des déclarations faites par des acteurs politiques
et des candidats aux élections qui ont été considérées au mieux comme
inhospitalières et au pire comme racistes. Elle a déclaré que les messages
émanant des plus hauts représentants de l'Etat doivent transmettre, sans
aucune ambiguïté, un véritable attachement à la promotion de l'égalité
et de la diversité au quotidien. A son avis :
« La promesse d'égalité
contenue dans la Constitution est une vision et non pas la réalité de la
France moderne. Les dirigeants de la France doivent remplir cette
promesse », a déclaré l'experte indépendante.
Mme McDougall a visité la France
du 19 au 28 septembre. Elle s'est rendue à Paris, Marseille et Strasbourg
où elle eu des entretiens avec des Ministres et d'autres hauts fonctionnaires
du gouvernement, des ONGs et des groupes de la société civile, des chefs
religieux, des universitaires et d'autres personnalités travaillant sur
les questions de minorités, discrimination, racisme et parité hommes-femmes.
Mme McDougall a fait des déplacements dans les banlieues de Paris et de
Marseille, notamment à Bobigny et à la Courneuve, particulièrement touchées
par les violences urbaines de 2005, pour s'entretenir directement avec
les habitants de leur vie et entendre leur histoire et leurs préoccupations.
Elle a également organisé des fora pour les femmes issues des minorités.
Elle en a conclu que les problèmes particuliers rencontrés par les habitants
des ghettos sont une conséquence directe de la discrimination raciale et
qu'il faut pour cette raison la mise en place de politiques visant leur
situation particulière.
Historiquement la France a toujours
rejeté la notion de droit des minorités et a toujours considéré que ces
droits sont incompatibles avec la Constitution française et les principes
de la République qui mettent en valeur les droits individuels, l'égalité,
l'unité et l'universalisme. L'experte indépendante s'est félicitée
des initiatives récentes contre la discrimination, notamment en 2005 la
loi contre la discrimination et la création de la Haute Autorité de lutte
contre la Discrimination et pour l'Egalité (HALDE) , organe indépendant
ayant un pouvoir de médiation ou de renvoyer devant les tribunaux des cas
de discrimination, ainsi que de réaliser des études et promouvoir
des activités en matière de non discrimination. Tout en se félicitant du
rôle de la HALDE et des Associations qui peuvent saisir la justice
au cas par cas, elle a insisté sur la nécessité d'une approche plus globale
et plus ferme. Les sanctions imposées en cas de discrimination doivent
être suffisamment sévères pour dissuader de toute nouvelle violation. «
À l'heure actuelle les amendes imposées semblent amoindrir l'importance
de la lutte contre la discrimination », a expliqué l'experte.
Mme McDougall en appelle à la promotion
de l'égalité par des politiques vigoureuses de « affirmative action ».
« La non discrimination n'est que la premier pas sur la voie de l'égalité
». Dans le domaine de l'emploi par exemple elle estime que l'Etat français
doit et que l'on peut facilement faire davantage pour donner des chances
à tout le monde et pour changer la composition de la fonction publique,
de la police et d'autres institutions publiques afin de refléter la grande
diversité de la société française.
L'experte indépendante a estimé
que « plutôt que d'être considérées comme une violation de la Constitution
française ces politiques du gouvernement doivent être vues comme essentielles
pour réaliser une vision véritable de la Liberté, de l'Egalité et de la
Fraternité. La reconnaissance de l'origine ethnique, de la religion et
de l'héritage de chacun ne doit pas être perçue comme une menace pour
les principes de l'unité et de l'égalité sur lesquels repose la
société française ».
L'experte indépendante salue
l'initiative prise par le Président Nicolas Sarkozy de lancer un débat
public sur les politiques de « affirmative action ». Elle regrette cependant
que les termes utilisés aient envoyé un message ambigu sur un véritable
attachement à ces politiques. « Lorsque des dirigeants politiques
parlent de « discrimination positive » cela ressemble à un message codé
de rejet de cette notion ; ce terme de « discrimination positive » colporte
la perception erronée que des privilèges sont accordés à des personnes
de certaines origines », a dit l'experte.
Elle ajoute à ce propos : « Il
reste encore beaucoup à faire pour que la diversité culturelle soit acceptée.
A ce jour les communautés de nouvelles minorités ont le sentiment largement
partagé qu'il ne suffit pas d'être un citoyen français pour être pleinement
accepté, que cette acceptation va de pair avec une assimilation totale
qui les oblige à renoncer à des pans entiers de leur identité. Ce n'est
que lorsqu'ils parviendront à changer la couleur de leur peau, cacher
les manifestations de leur religion ou les traditions de leurs ancêtres;
et à ce moment là seulement qu'ils seront acceptés comme français à part
entière. Le message implicite dans l'appellation du nouveau Ministère
de l'Immigration de l'Identité Nationale de l'Intégration et du Co-developpement
semble leur indiquer que la présence et le nombre croissant de personnes
issues de l'immigration menacent l'identité nationale de la France et
constituent un problème qui doit être résolu. »
L'experte indépendante a reçu,
de diverses sources, des informations sur la situation d'autres groupes
de la société française y compris les Rroms, les Bretons et la communauté
juive. Leur situation sera couverte dans le rapport intégral de la mission
qui sera présenté au Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies.
Elle s'est plus particulièrement concentrée sur les expériences de citoyens
français issus de l'immigration, de populations stabilisées en France
souvent décrites comme «nouvelles minorités » en particulier
les populations d'origine nord africaine, d'Afrique sub-saharienne, les
musulmans et celles originaires des départements et territoires d'Outre-Mer.
Les visites réalisées auprès de
communautés de minorités où l'experte indépendante a organisé des fora
à leur intention ont fait apparaître des sentiments de frustration
parmi de nombreux citoyens français issus de l'immigration du fait qu'en
dépit de leur grand attachement au principe d'égalité et aux valeurs
de la France, ils restent des citoyens de seconde classe qui n'ont pas
accès aux mêmes opportunités que les autres, ils sont accusés de communautarisme
alors qu'en réalité ils n'ont d'autre choix que celui de vivre dans
des ghettos isolés de logements sociaux. Des préoccupations ont également
été portées à l'attention de l'experte indépendante à propos du débat
actuel sur l'immigration qui porte, entre autres, sur les questions
des contingents d'expulsions et des tests ADN. Ce débat crée un
climat général de suspicions et de rejet envers les populations issues
de l'immigration.
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Le mandat de l'Experte Indépendante
des Nations Unies était établi en 2005 pour promouvoir la Déclaration des
droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques,
religieuses et linguistiques. Mme Gay McDougall, première Experte Indépendante
sur les questions relatives aux minorités, est un ancien membre du Comité
pour l'élimination de la discrimination raciale des Nations Unies et de
la Sous-commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme.
Elle était Directeur Exécutif de l'ONG Global Rights' entre 1994 et
2006, et est actuellement affiliée à l'Université Américaine a Washington
D.C. Pour plus d'information sur les fonctions de l'Experte Indépendante,
merci de visiter http://www.ohchr.org/english<wbr>/issues/minorities/expert<wbr>/index.htm.
UN Independent Expert on minority
issues calls for clear and committed leadership to promote non-discrimination,
equality and diversity in France
Paris, 28 September 2007:
During her official mission to France, the United Nations Independent Expert
on minority issues, Ms Gay J. McDougall, found that serious discrimination
is experienced by members of minority communities in France and she called
on the French Government to respond with policies that address effectively
widespread, entrenched and institutionalized discrimination in French society.
Racism is alive, insidious and
clearly targeted at those visible minorities of immigrant heritage,
the majority of whom are French citizens, the Independent Expert stated.
Young people's hopes and dreams
are being denied; they see no possibility of upward mobility because of
their skin colour, their religion, their surname or their address (in what's
called the sensitive suburbs). People who have worked hard, played by all
the rules and truly believe in the principles of the French Republic are
trapped in socially and geographically isolated urban ghettos, with unemployment
in some areas over 40 per cent. They feel discriminated against and rejected
by rigid notions of French national identity to which they do not conform,
she said.
The Independent Expert expressed
her concern about statements made by French political leaders and candidates
during the electoral period that have been viewed as at best unwelcoming
and at worst of a racist nature. She stated that the messages coming from
the highest officials of the state must be unambiguous in signaling full
commitment to promoting equality and diversity in practice.
The Constitutional promise of
equality is the vision, but not the reality of modern France. France's
leaders must live up to that promise, she stated.
Ms. McDougall visited France between
19 and 28 September. She traveled to Paris, Marseilles and Strasbourg,
during which she held consultations with Ministers and other senior governmental
representatives, NGOs and civil society groups, religious leaders, academics
and others working in the field of minority issues, discrimination, racism
and gender issues. Ms McDougall visited the suburbs of Paris and Marseilles,
including Bobigny and La Courneuve, areas affected by urban upheavals in
2005, to talk directly to community members about their lives and hear
their stories and concerns. She also held forums specifically for minority
women. She concluded that the particular problems faced by people in these
ghettos is a direct consequence of racial discrimination and consequently
require policy initiatives targeted to address the special circumstances
that they face.
France has historically rejected
the concept of minority rights and recognition of minority groups as incompatible
with the French Constitution and the principles of the Republic, which
prioritize individual rights, equality, unity and universalism. The Independent
Expert commended recent anti-discrimination initiatives including the 2005
anti-discrimination law and the establishment of the High Authority to
Fight Discrimination and Promote Equality (HALDE), an independent body
with powers to mediate or refer for prosecution discrimination cases, conduct
studies and promote non-discrimination activities. While welcoming the
role of the HALDE and civil society organizations in prosecuting discrimination
on a case-by-case basis, she emphasized that a broader and more robust
approach is required. Penalties for discrimination should be sufficiently
severe to act as a deterrent to future violations. Currently, she commented,
the fines imposed seem to belittle the whole exercise of combating discrimination.
Ms. McDougall calls for the promotion
of equality through robust affirmative action policies. Non-discrimination
is just the first step in establishing equality. In the area of employment,
for example, she believes that more must be done and can be done easily
to create opportunities for all and to transform the ranks of the civil
service, the police, and other public institutions to reflect the broad
diversity within French citizenry.
Rather than being considered to
violate the Constitution of the French Republic, the Independent Expert
commented that such action on the part of the Government should be seen
as essential to achieving a true vision of Liberté, Egalité
et Fraternité. The acknowledgement of ethnicity, religion and
heritage should not be considered to threaten the principles of unity and
equality that are the foundation of French society.
The Independent Expert commends
President Nicolas Sarkozy for opening a public discussion on affirmative
action policies. But she regrets that the terminology that he used
sent mixed messages about his support for such initiatives. When
you hear national leaders using the term positive discrimination it
sounds like a coded instruction to reject the concept; the term conjures
up misleading perceptions of privileges given to those from certain backgrounds.
Much more also remains to be
done to establish an acceptance of cultural diversity. Currently,
there is a widespread feeling within the communities of new minorities
that to become a citizen of France is not sufficient for full acceptance;
that acceptance will be granted only with total assimilation that forces
them to reject major facets of their identities. Only when a way
is found to shed the color of their skins, hide the manifestations of their
religion or the traditions of their ancestors, only then will they be accepted
as truly French. The message that they take from the name of the new Ministry
of Immigration, National Identity, Integration and Co-development seems
to be that the presence and increasing numbers of people of immigrant heritage
is a threat to the national identity of France; that it is a problem that
must be solved, she stated.
The Independent Expert received
information from numerous sources regarding the situation of many groups
within French society, including the Roma/travelers, the Breton and the
Jewish community, that will be reflected in her full visit report to the
UN Human Rights Council. She focused particular attention on the experiences
of French citizens of immigrant heritage, settled residents of France,
sometimes described as new minorities, including those of North African,
sub-Saharan origin, Muslims, and those from the overseas departments and
territories.
Visits to minority communities
where the Independent Expert held forums for community members revealed
frustration amongst many French citizens of immigrant origin that despite
their own strong commitment to French values and principles of equality,
they remain second class citizens, lacking the opportunities available
to others, and blamed for communitarianism when in fact they are given
little choice other than to live in isolated low cost housing ghettos.
Concern was also expressed to the Independent Expert regarding current
debates on immigration, announcing quotas for deportations, and questions
of DNA testing for example, which generate a general climate of suspicion
and negativity against those of immigrant origin.
________
The mandate of the Independent
Expert was established in 2005 to promote implementation of the UN Declaration
on the Rights of Persons Belonging to National or Ethnic, Religious and
Linguistic Minorities, and to identify successful practices on the issues
addressed by her mandate.
Ms. Gay McDougall, the first
Independent Expert on minority issues, is a former member of the UN Committee
on the Elimination of Racial Discrimination (CERD) and the Sub-Commission
on Human Rights. She was Executive Director of the NGO Global Rights until
April 2006, and is currently Scholar in Residence at the American University,
Washington.
For more information about the
role and function of the Independent Expert, please visit the homepage
http://www.ohchr.org/english<wbr>/issues/minorities/expert<wbr>/index.htm